Romans

Qu’as-tu fait de tes frères ?

Claude Arnaud


Grasset, 2010

Temps de lecture: 2 minutes
Qu’as-tu fait de tes frères ? - photo

Tout commence au début des années 1960, alors que le narrateur, Claude — ou Clodion—, a sept ans. Il est le troisième d’une fratrie prodigieuse. La famille habite une barre ultra moderne à la limite entre Paris et Boulogne. La vie est facile, avec ses fascinantes escapades en Corse l’été, dans la famille de leur mère. Les aînés, Pierre et Philippe, sont de grands lecteurs et des modèles d’intelligence, qui stimulent un petit garçon précoce.

Et puis, alors que les années 1960 se finissent et que les grands frères adolescents se révoltent contre leur famille modèle, celle-ci entre dans une lente détérioration qui vire au tragique. Livré à lui-même, Clodion va grandir tout seul : mai 68, activisme politique, contre-culture, libération sexuelle, université de Vincennes, il est de toutes les expériences des années 1970. Alors que ses frères sont plombés par un incroyable sérieux, Clodion a choisi de voguer à la surface des choses. Grâce à quoi, il va traverser l’époque comme un bouchon de liège sur un océan agité.

Bien qu’intitulé « roman », Qu’as-tu fait de tes frères ? est largement un récit autobiographique. Mené à un rythme rapide, il est à l’image de son narrateur : d’une grande élégance, évoquant les êtres et les choses comme en passant, sans appuyer. Ce sont vingt années qui défilent en 360 pages, témoignage sur une époque qui nous est devenue presque étrangère, et succession de figures de la culture française (de Roland Barthes à Hervé Guibert).

L’homosexualité est l’un des thèmes importants du livre : du coming out précoce de Philippe (à 14 ans dans les années 1960 !) aux aventures en tous genres de Clodion. Pourtant, un fossé sépare l’amour des garçons très abstrait et torturé du grand frère et la sensualité libertine et comme sans limites du héros-narrateur. En ce sens, Qu’as-tu fait de tes frères ? raconte dans toute sa simplicité une existence bisexuelle qui se passerait de toute étiquette, même si les garçons y ont la première place.