Je suis actuellement en terminale et ma copine en seconde dans le même lycée que moi. J’ai 18 ans et elle en a 16. Nous ne nous cachons pas dans le lycée, tout le monde sait que nous sommes ensemble et nous n’avons jamais eu de problèmes avec les autres élèves.
Nous avons été victimes d’une agression verbale en février dernier de la part d’un professeur de notre lycée qui nous a vues en train de nous faire un simple câlin. Il s’est arrêté devant nous et nous a dit ces mots : « Vous êtes deux filles !? Et vous vous embrassez !?« . Au début je pensais presque à une plaisanterie et après je me suis rendu compte qu’il ne rigolait absolument pas quand il est allé chercher la CPE… qui heureusement pour nous n’était pas là. Il est donc revenu avec un surveillant qui nous a expliqué que ce prof-là était assez « vieux jeu » et qu’il ne fallait pas prendre en compte ses remarques et à l’avenir rester plus discrètes.
Le prof, lui, a continué à avancer au bout du couloir où se trouvaient mes amis et il leur disait qu' »ici ce n’est pas une porcherie » et qu’il « n’accepterai[t] jamais ça de ses propres filles« , etc. Il a dit que s’il nous recroisait il irait en parler à notre principale et que nos parents seraient mis au courant, et qu’en gros il chercherait à nous pourrir notre fin d’année. Après ça il est parti et depuis trois mois, dès que nous le revoyons, nous nous faisons les plus discrètes possible.
Quelles solutions il y a-t-il pour lutter contre ce genre de comportement ? Surtout venant d’un professeur.
Merci d’avoir pris connaissance de mon témoignage, en espérant que vous pourrez y répondre.
Témoignage reçu en mai 2010
Le commentaire de C'est comme ça
Merci pour ton témoignage, qui est plutôt positif (vous pouvez vivre librement votre amour devant les autres lycéen-ne-s) mais montre en même temps que l’homophobie peut venir de là où on ne s’y attend pas.
Dans l’absolu, on peut dire que cet enseignant a eu un comportement discriminatoire, devant témoins. Cela se serait passé dans un univers d’adultes, ce serait punissable par la loi, surtout qu’il vous a menacées et a cherché à vous intimider. En plus, la menace d’en parler à vos parents revenait à divulguer votre vie privée. L’ennui, c’est que ce genre de comportement est souvent pris à la légère quand il concerne des mineur-e-s (ce qui est la situation de ta copine). Après, il y avait plusieurs options pour réagir, et ce n’est pas à nous de dire quelle est la meilleure. On peut dire que plus vous auriez réagi vigoureusement à l’injustice et plus vous vous seriez exposées, notamment par rapport à vos parents. Et c’est important de faire la balance entre tous les arguments. Du côté action, vous pouviez, éventuellement soutenues par un syndicat lycéen, vous plaindre auprès du chef d’établissement, voire auprès du conseil d’établissement, via les élus lycéens. Cela dépend aussi de ce que l’on trouve dans le règlement intérieur du lycée concernant la "décence" et la "correction" dans le comportement des élèves, deux termes qu’on peut interpréter de différentes façons. Dans le cas d’une absence de réaction de la "communauté éducative", une association comme SOS homophobie pouvait aussi écrire au chef d’établissement pour faire un "rappel à la loi". Plus on va vers des procédures importantes et qui sortent de l’établissement, et plus cela vous expose, notamment au regard de vos familles. Du côté de la prudence (option qui a été la vôtre), il y a : les réactions imprévisibles des adultes, leur éventuel manque de courage, ou leur solidarité à l’égard d’un collègue, et le risque d’une annonce à vos parents qui vous aurait peut-être échappé (dès lors, c’était un outing). Cela risquait de perturber vos études, aussi.
Entrer en lutte contre les injustices est une chose admirable et nécessaire, mais il faut toujours peser le "pour" et le "contre".
Pour témoigner sur le site de C'est comme ça,
vous pouvez écrire à l'adresse cestcommeca@sos-homophobie.org
Attention à bien lire la charte des témoignages avant de nous écrire.