Je m’appelle Florent, j’ai 23 ans aujourd’hui, et j’ai fait mon coming out lorsque j’avais 17 ans et que j’étudiais dans un lycée agricole, en internat.
A l’époque, j’étais fou amoureux d’un de mes camarades de chambrée et même si je n’avais pas encore accepté que je suis homo et qu’il s’agissait d’une situation particulière, je sentais qu’il y avait là quelque chose “d’impossible” qui m’a mis très mal à l’aise à l’époque. Quand je me suis rendu compte de mon homosexualité et de ce que ça impliquait, j’ai d’abord eu une réaction de rejet total. J’ai beaucoup pleuré, j’ai prié aussi, même si je ne suis pas spécialement croyant, mais je cherchais n’importe quoi à quoi me raccrocher pour essayer de “redevenir normal”. Et c’est comme ça que j’ai fini par sortir avec une camarade de classe : pour essayer d’être normal, comme tous mes autres copains.
Notre relation a duré quelques temps, mais je sentais bien qu’il y avait tout de même quelque chose qui “clochait”, et que je n’étais pas satisfait de cette situation. J’ai beaucoup retourné la question dans ma tête, et finalement, j’ai bien été obligé d’admettre que j’avais toujours été attiré par des garçons, d’aussi loin que je puisse me rappeler, et que si je ne me sentais pas à ma place auprès de ma copine, c’était sans doute parce qu’il fallait que j’accepte cette réalité différente qui était la mienne.
J’avais un peu peur au début, de dire à mes amis que je suis homo, mais j’avais eu la chance de n’avoir jamais été témoin de situations homophobes : j’avais toujours été épargné, et c’est peut-être cette naïveté qui m’a aidé à franchir le pas et à faire mon coming out.
Je l’ai d’abord dit à une amie très proche, et même si elle a été étonnée, étant donné que je sortais avec une fille, elle l’a très bien accepté. Fort de ce premier succès, j’ai trouvé le courage d’en parler à ma petite amie qui – étonnement – n’a pas paru s’offusquer outre mesure de ma révélation. Et puis petit à petit, j’ai élargi mon coming out à tout mon cercle d’amis et ne rencontrant aucun problème, j’en ai parlé plus librement, de sorte que toute ma classe et sans doute une bonne partie du lycée ont dû finir par être au courant.
J’ai eu un peu peur, à l’époque, je me disais : c’est un lycée agricole, il doit y avoir plus de préjugés, je vais tomber sur des connards qui vont me faire des problèmes. Eh bien non ! Aussi incroyable que cela puisse paraître, je n’ai jamais été victime d’aucune manifestation homophobe d’aucune sorte. Je n’ai jamais été insulté, encore moins menacé ou frappé, ni même ridiculisé ou marginalisé. Si certains ont eu des réactions négatives, elles ne me sont jamais parvenues.
Après avoir discuté avec des amis de mon étonnement face aux réactions si positives de l’ensemble de mes camarades de classes – il y en avait pourtant des plus ou moins machos, de la part de qui j’avais craint spécialement des réactions négatives.
La seule explication qui soit ressortie de ces discussions a été : “Tu n’as jamais changé ton comportement. Tu as toujours été honnête et tu n’as pas cherché à cacher la vérité. Tu n’as menti à personne, du coup personne n’avait d’accroche pour te lancer la moindre pique.“
En gros, mes amis étaient persuadés – et je le suis également entre temps – que c’est parce que j’ai réussi a surmonter mes problèmes rapidement, et à me montrer tel que je suis aux autres, que du coup, personne n’a trouvé de prétexte ou d’occasion de se moquer de moi ou de m’insulter.
Depuis, je suis convaincu que le fait d’avoir un problème avec soi-même, est un terrain sur lequel les homophobes peuvent trouver une accroche pour nous faire du mal. Bien sûr, je suis conscient d’avoir eu énormément de chances, mais tout de même, je crois que m’être comporté en assumant mon homosexualité, a joué pour beaucoup dans l’acceptation qu’ont eu les autres de moi-même.
D’ailleurs, la meilleure preuve qui soutienne cette théorie, est le fait que lorsque après mon baccalauréat, je suis entré en BTS agricole dans un nouveau lycée, j’ai adopté la même attitude assumée et décontractée, affichant la couleur d’entrée de jeu (de manière même un peu “provocante” : j’ai accroché des poster-boys de Têtu sur les murs de ma chambre d’internat), eh bien en deux ans, je n’ai jamais eu aucune remarque négative, ni aucune insulte.
Bien sûr certains de mes camarades étaient plus ou moins mal à l’aise avec le sujet, et il y a eu des plaisanteries à ce sujet, mais ils ont tous très vite compris que je n’avais pas de problème avec ce que je suis et du coup, c’est leur curiosité qui l’a emporté, et j’ai dû répondre à des questions un peu plus naïves telles que: “Mais ça te plait de te faire enculer ? Ça ne fait pas mal ?” ou bien : “Ça ne te gêne pas de faire la fille ?“.
Mais toutes ces questions, même si elles m’ont paru sur le coup un peu désagréables, n’étaient probablement motivées que par la curiosité et l’originalité que je devais représenter à leurs yeux. En fin de compte, j’ai l’impression d’avoir eu affaire à des gamins qui découvrent les mots “pénis” et “anus” et qui ont besoin d’un petit temps d’adaptation avant d’intégrer cette nouvelle réalité dans leur vie quotidienne. J’ai aussi eu affaire à des réactions, non pas hostiles mais plutôt “angoissées”, comme un de mes camarades de classes qui m’a dit : “Je n’ai pas de problème avec le fait que tu sois gay, tant que tu me sautes pas dessus.” … J’ai trouvé un peu décevant que je lui fasse de toute évidence si peur, et surtout, je me suis demandé si lui, en tant qu’hétéro, ne pensait qu’à sauter sur la première fille qui pourrait passer à sa portée.
Témoignage reçu en mai 2010
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