Salut,
Je suis un bachelier, j’ai 18 ans et je vis en Algérie. J’ai réalisé l’an passé que je suis bisexuel. Bon, je vais vous raconter mon histoire.
À l’école primaire, je sortais avec des filles, je tombais amoureux, mais en première année du secondaire[l’équivalent du lycée], j’ai connu un mec qui était plus âgé que moi de 2 ans. Il était très différent des autres mecs sur le plan de la beauté, de la mentalité, de l’esprit, de la façon de parler, de plaisanter et tout, trop stylé ! Au début, pendant un an, j’ai cru que je l’aimais juste comme un frère. Mais une fois où on était ensemble, j’ai eu une grande et intense envie de le câliner. Mon cœur palpitait au point qu’on aurait dit qu’il allait sortir de ma poitrine. À ce moment-là, j’ai découvert mon orientation sexuelle, je suis devenu très malheureux et la preuve, mes résultats scolaires se sont dégradés alors que ce n’était pas dans ma nature, j’étais toujours parmi les premiers d’habitude. J’ai fait mon possible pour l’oublier et je l’ai fait grâce à mon Dieu (sachant que je suis musulman pratiquant, à chaque prière, je prie mon Dieu de m’aider et me soutenir, de me faire sortir de ce dilemme qui me causerait beaucoup de problèmes dans le futur si je ne m’en débarrassais pas).
Je n’ai raconté mon problème qu’à mon premier et meilleur ami que j’ai connu en 1999. On est toujours des amis, même des camarades de classe depuis la classe préparatoire, il m’a écouté et m’a accepté. Par contre, les autres ici en Algérie n’acceptent pas le fait qu’un mec soit attiré par les mecs. Des fois quand je leur parle de ce sujet, ils commencent à maudire les homos et tout ce qui les concerne, mais moi j’essaie de leur faire comprendre que ce n’est pas une décision, ça vient tout seul. Mais ils restent intolérants, ils se prennent pour des représentants religieux. Moi le truc qui me dérange c’est que je crains qu’un jour je rencontre un mec qui ait toutes les qualités qui me plaisent et qui s’intéresse à moi. Comment pourrai-je réagir ? Qu’est-ce que vont dire mes parents, ma famille, mes amis, les gens ?
Et… mon Dieu ? Comment vais-je le satisfaire puisque Dieu m’a infligé ce souci pour me tester et voir si je pourrais résister et contrôler mes désirs ou pas. On appelle ça dans notre religion “l’auto-Jihad” : ça veut dire maîtriser ses ardeurs et ses sentiments, et réussir à se contrôler.
Je voudrais être hétérosexuel à 100% mais depuis quelque temps, je ne sais pas ce qui m’arrive. Quand je vois un des mecs de mon lycée, ça me donne un sentiment vraiment bizarre que je ne peux pas expliquer à moi-même. On s’est croisés à l’arrêt de bus, il m’a regardé, puis on est montés dans le même bus et je me suis assis à côté de lui. Je ne veux plus ressentir la même chose que j’avais ressentie avant, je ne veux pas retomber dans ce piège.
J’ai mon bac cette année-ci et je voudrais bien bosser pour aller à l’étranger et réaliser mes rêves qui sont impossibles ici… Dois-je patienter ou renoncer à ce que mon cœur demande ? Je n’ai pas de réponse aujourd’hui…
Témoignage reçu en février 2014
Le commentaire de C'est comme ça
Massi* a peur quand il pense à son attirance pour les garçons, et il est vrai que tous les environnements ne permettent pas de s'accepter sereinement. Lorsqu'on vit dans un pays où l'homosexualité est très fortement réprouvée, où l'on peut même se faire arrêter et emprisonner pour cela, il n'y a pas beaucoup de choix : l'abstinence ou la clandestinité.
Le secret peut être la seule façon de vivre ses attirances et ses amours, mais au prix d'une vigilance permanente. Il est donc logique que Massi rêve de l'étranger, où il pourrait se sentir bien plus libre : moins de pression sociale, moins de crainte que la famille n'apprenne la vérité.
Pourtant, même ailleurs, il lui faudra réussir à concilier sa foi et son orientation sexuelle. Certains y parviennent dans la spiritualité, car le Coran peut être interprété de différentes manières. Ces musulmans progressistes prêchent pour davantage d'ouverture et de tolérance, mais leur voix reste encore très minoritaire (voir l'article Religion et homophobie). Dès lors, c'est à chaque croyant de choisir sa façon de vivre. L'essentiel est que cela doit rester une décision libre et non imposée.
* le prénom a été modifié.
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vous pouvez écrire à l'adresse cestcommeca@sos-homophobie.org
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