Troye Sivan fait partie de ces visages qu’on a vus maintes fois sur internet (notamment sur tumblr), posté et reposté des millions de fois, sans savoir forcément à qui il appartenait. Traits androgynes, un peu creusés, souvent éclairés par un sourire un rien mutin : il en faudrait peu pour qu’il fasse figure de poster boy à l’heure d’internet et des réseaux sociaux.
Troy Sivan Mellet est né le 5 juin 1995 à Johannesburg (Afrique du Sud). Il n’avait que deux ans quand ses parents quittèrent le pays pour s’installer à Perth, dans l’ouest de l’Australie. À onze ans à peine, il est devenu célèbre dans son pays d’adoption pour une performance lors du Téléthon local. Il y interpréta “Somewhere Over The Rainbow”, une chanson tirée du Magicien d’Oz, et un duo avec une vedette de télévision. Trois années de suite, il s’est produit lors du Téléthon local, débutant en parallèle des carrières de chanteur et d’acteur, sur les planches puis au cinéma. Dans les pays anglophones, ce genre de débuts très précoces est assez fréquent et souvent encouragé par les parents. D’ailleurs, les siens l’ont retiré très tôt du système scolaire australien pour qu’il puisse mener de front sa carrière naissante et ses études (on parle de homeschooling) ; peut-être s’agissait-il aussi de le protéger des effets négatifs d’un succès trop précoce ?
Multipliant les expériences théâtrales (de la comédie musicale Oliver Twist à une mise en scène d’En attendant Godot de Samuel Becket avec Ian McKellen), il a été contacté en 2008 par les producteurs du film X-Men Origins: Wolverine pour interpréter le personnage de Wolverine enfant. Par la suite, il a été choisi pour incarner au cinéma le personnage de John “Spud” Milton, le héros d’une série de romans très populaires en Afrique du Sud, écrits par John van de Ruit. Cette série souvent très drôle raconte sous forme de journal les années de pensionnat d’un adolescent blanc (un rien gringalet et complexé) de la fin des années d’apartheid. L’adaptation du premier volume a été un énorme succès en Afrique du Sud en 2011, faisant de Troye Sivan une star dans son pays d’origine. Depuis, deux autres épisodes ont été tournés. Cette série a permis de mesurer le talent du jeune acteur dans toutes sortes de registre, de la comédie au drame. Son partenaire de jeu, le grand comédien anglais John Cleese (un ancien Monty Python), lui a rendu plusieurs fois hommage, louant son professionnalisme et sa capacité d’adaptation.
En parallèle, Troye Sivan a commencé dès 2007 à poster des vidéos de chansons réalisées chez lui. Il s’agissait la plupart du temps de reprises de tubes de variété internationale mettant en valeur sa voix, avec des arrangements minimalistes. Il s’est impliqué de nombreuses fois pour des causes humanitaires, sur des sujets comme le handicap, la maladie ou la faim dans le monde. Une grande retenue dans la manière de parler de sujets graves en chanson a été sa marque de fabrique constante. À partir de 2011, il a commencé à écrire lui-même des textes. Le déclic a été un hommage à Amy Winehouse, brutalement disparue en juillet de cette année-là. La chanson est intitulée June Haverly (le prénom correspond à son mois de naissance et le nom de famille est celui de sa mère). C’est une méditation sur la célébrité qui parfois brûle les ailes de ceux/celles qu’elle porte aux nues. Depuis, il a surtout écrit des textes humoristiques au ton plutôt léger et distancié. Il s’est fait une spécialité des commentaires acidulés sur l’année écoulée, inaugurés dans The 2012 Song (depuis il y a eu The 2013 song). Il a sorti trois mini-albums depuis 2007. Le troisième, TRXIE, résolument électronique, a été un gros succès. Si son inspiration musicale n’est pas de tous les goûts, sa voix et sa façon d’interpréter ses chansons sont un atout et on peut lui souhaiter de rencontrer un compositeur à la mesure de ses talents.
Mais la notoriété lui est surtout venue à travers ses activités de blogueur vidéo (vlogueur). À partir de septembre 2012, il a commencé à publier régulièrement des vlogs loufoques, mettant en scène, outre lui-même, des membres de sa famille, des amies, puis d’autres vlogueurs plus ou moins célèbres. Depuis cette date, son nom d’artiste est devenu une signature internet, associant vidéos, tweets, page facebook, posts sur tumblr, etc. Sa popularité a encore augmenté lorsqu’il a commencé à s’associer avec Tyler Oakley, l’un des plus célèbres vlogueurs dans le monde anglophone. On ne compte plus les réalisations de fan pour les imaginer en couple : c’est l’un des OTP (one true pairing) ou shipping (association imaginaire) les plus populaires sur internet parmi les adeptes de fan fiction. Plus récemment, c’est son rapprochement avec un autre vlogueur, Connor Franta, qui a suscité le même genre de fantaisies.
Cette situation a été largement nourrie par ce qui reste le plus célèbre geste de Troye Sivan : le 7 août 2013, il a publié un post de vlog intitulé “coming out”, dans lequel il annonçait son homosexualité à ses 450 000 fans de l’époque. Depuis, la vidéo a été vue plusieurs millions de fois. Il y a eu très peu de réactions négatives. Son geste était d’autant plus courageux qu’il est intervenu alors qu’il n’avait que 18 ans et que sa carrière ne faisait que commencer. Même si dans le monde anglophone les coming out de vedettes se multiplient, il est rare qu’ils soient le fait de personnalités aussi jeunes. Depuis cette date, le jeune acteur, chanteur et blogueur n’a cessé de gagner en notoriété et en audience, tout en restant très discret sur sa vie privée (malgré les apparences). Il cultive un art malicieux du teasing dans ses vidéos. S’il n’hésite pas à se tourner en ridicule ou à faire des blagues de potache, il sait néanmoins protéger très sérieusement sa vie privée.