Romans ados

Le Soleil est pour toi

Jandy Nelson


Gallimard, 2015

Temps de lecture: 2 minutes
Le Soleil est pour toi - photo

Jude et Noah sont sœur et frère jumeaux, élevés par une mère critique d’art et un père biologiste. Ils habitent Lost Cove dans le Nord de la Californie, un patelin côtier où abondent les forêts et les criques, les sentiers et les détours. Ils ont treize ans quand l’histoire commence. Noah ne parle pas beaucoup, il dessine et peint énormément, souvent des garçons, et quand il ne peut pas, il imagine des tableaux dans sa tête. Jude a une énergie incroyable, elle passe son temps sur l’océan à faire du surf quand elle ne flirte pas avec Zephyr, une brute épaisse. Et de temps en temps, elle se cache pour sculpter des femmes de sable que la marée emportera.

La narration alterne des chapitres où parle Noah (entre 13 et 14 ans) et d’autres où c’est Jude qui s’exprime (quand elle a 16 ans). Très vite, on apprend que leur mère est morte dans un accident de voiture quand ils avaient quatorze ans, événement essentiel dont les circonstances vont se préciser peu à peu… Entretemps, les jumeaux ont changé. Jude a arrêté de nager et de courir les garçons, elle se cache dans des vêtements trop grands pour elle, elle est devenue superstitieuse et hypocondriaque. Noah a arrêté de peindre et s’est mis en tête de devenir “normal”, ayant comme oublié sa vocation d’artiste “révolutionnaire” (comme il disait à 13 ans !). Apparaît Oscar, un jeune Anglais un peu déglingué mais assez irrésistible, photographe, modèle à l’occasion, trait d’union entre les principaux personnages. Il a été recueilli chez lui par le sculpteur Guillermo Garcia, un colosse irascible qui cache un mystérieux secret. La mère des jumeaux a écrit un livre sur lui et Jude aimerait devenir son élève. Noah, de son côté, a fait la connaissance de Brian, un garçon de son âge, passionné par les cailloux tombés du ciel et les étoiles (des préoccupations tellement gratuites qu’elles sont “révolutionnaire” pour lui) et champion de baseball (ça, ça lui paraît tellement “normal”, trop peut-être). Que s’est-il passé entre eux ?

Sur cette base un peu mystérieuse, Jandy Nelson a construit un roman foisonnant, qui connaît des hauts et des bas d’émotion vertigineux. Il y est beaucoup question d’art, de création, d’amour, de deuil aussi : des thèmes assez banals, mais qui vibrent de manière neuve. S’y mêlent une pointe de fantastique (il est beaucoup question de fantômes) et pas mal de culpabilité (qui travaille abondamment les protagonistes). Le style de l’auteur est frémissant, passant sans crier gare de la poésie au délire, d’évocations palpitantes en moments comiques, avec un humour et une inventivité constants.