Ma vie de LGBT / Parents LGBT

Interview de Lionel : coparentalité


Temps de lecture: 4 minutes

Est-ce que la question de la parentalité était déjà présente à ton esprit lorsque tu étais ado ?

Oui j’ai toujours eu le désir d’être parent même si cela était encore très abstrait quand j’étais jeune.

Est-ce que ça a été un sujet de réflexion lorsque tu as découvert que tu étais gay ?

Selon moi, accepter mon orientation sexuelle impliquait nécessairement de renoncer à l’idée d’être parent. C’est d’ailleurs, une des premières réactions que mes parents ont eues lorsque j’ai fait mon coming out : “Tu auras beaucoup de mal à donner du sens à ta vie, si tu ne peux pas transmettre, avoir une famille…”. Cette réaction m’avait beaucoup attristé à l’époque, même si contrairement à ce que disaient mes parents, on peut donner autant de sens à sa vie avec ou sans enfants.
J’ai aujourd’hui 41 ans et lorsque j’ai commencé à accepter l’idée d’être gay à l’âge de 19/20 ans, les possibilités de devenir parent pour les personnes LGBT étaient très limitées. Nous n’avions aucune possibilité légale d’adopter dans le cadre d’un couple de même sexe, les parcours de PMA ou la GPA m’étaient inconnus. La coparentalité commençait à se pratiquer mais je ne connaissais aucune personne de mon entourage dans cette situation.

A quel âge as-tu commencé à y songer ?

Il y a 10 ans, j’ai commencé à réfléchir de façon plus concrète au projet de devenir père, notamment en rencontrant des personnes LGBT qui étaient déjà parents. La société puis la législation ont évolué ces dernières années et cela m’a permis d’envisager différents parcours de parentalité.

Est-ce que devenir parent a été un parcours compliqué ?

Les parcours « d’accès à la parentalité » pour les personnes LGBT sont multiples (adoption, PMA, GPA, coparentalité) et présentent chacun leurs spécificités. Les difficultés peuvent être liées au parcours choisi, parfois très long et nécessitant de nombreuses démarches administratives et légales, ce qui est le cas de l’adoption et de la GPA. Pour ma part, nous avons fait le choix avec ma meilleure amie de devenir coparents et cela a été relativement simple au niveau de la conception de notre enfant. Mais chaque expérience est unique et cela dépend souvent de questions de fertilité du ou des parents indépendamment de leur orientation sexuelle.

Comment vis-tu le fait d’être parent LGBT ?

A vrai dire, je ne me considère pas comme un “parent LGBT”. Je suis gay, je l’assume depuis longtemps, je vis avec mon copain, je milite pour les droits LGBT.  En revanche, je ne pense pas que mon orientation sexuelle puisse définir ma façon d’être “parent”. J’ai les mêmes préoccupations que mes ami-e-s hétérosexuel-le-s qui élèvent leurs enfants : leur donner de l’attention, de l’amour, trouver une place en crèche, espérer qu’il fasse ses nuits pour que je retrouve moi-même le sommeil ! Chaque parent quelle que soit son orientation sexuelle a ses propres valeurs, sa propre histoire. Le projet éducatif qu’un parent souhaite offrir à son enfant n’est pas lié, à mon sens, au fait d’être LGBT.

En revanche, même si les mentalités évoluent, je dois souvent expliquer ma situation : celle d’élever un enfant en coparentalité avec sa maman avec laquelle je ne vis pas et d’être en couple avec un homme avec qui j’habite. Pour le moment, nous n’avons rencontré aucune difficulté avec nos familles, nos ami-e-s, l’administration, les médecins…

Aurais-tu un message à passer aux jeunes qui nous lisent ?

La situation aujourd’hui, même si de grandes avancées doivent encore être accomplies, n’est pas la même qu’il y a 20 ans. Aujourd’hui les jeunes LGBT qui font leur coming out n’ont pas à renoncer à l’idée de se marier ou avoir des enfants. Le message que j’aimerais leur faire passer : le cadre légal est aujourd’hui plus favorable et va continuer à évoluer, la société accepte mieux les différentes formes de parentalité. Etre LGBT et parent est possible et tout à fait légitime.
Nous venons d’avoir un petit garçon qui a aujourd’hui deux mois. Avec sa maman, nous sommes tellement heureux d’accueillir cet enfant dans nos vies. La seule chose importante qui s’applique à tout futur parent, LGBT ou non, est de bien réfléchir à son désir d’enfant et à son projet parental.