Je me pose des questions

Les stades de la découverte et de l’affirmation de l’identité sexuelle

Orientation amoureuse & sexuelle

Temps de lecture: 6 minutes

Il s’agit des étapes d’appropriation de son orientation sexuelle les plus couramment vécus. Ces stades ont été définis grâce à de nombreuses études en psychologie, mais ne reflètent pas une norme (il existe d’ailleurs plusieurs théories sur la question, nous en avons choisi une qui reste assez simple). Ces “jalons” ont été déterminés interrogeant des milliers de personnes au sujet de leurs parcours, pour essayer d’en trouver les points communs.

Ces stades ne sont que des indications et non une vérité absolue, car la vie est souvent plus complexe que la théorie ! Chacun-e pourra ressentir les choses différemment (plus ou moins longtemps, plus ou moins intensément) et pas forcément dans l’ordre (une expérience négative pourrait par exemple nous donner envie de remettre ses attirances au placard pendant quelque temps).
De plus, le parcours de chacun-e n’est pas que personnel : notre environnement social, familial et amical va avoir une forte influence. 
Pour finir, il pourra y avoir une différence entre les 3 facettes de l’orientation sexuelle : attirances / comportement / autodésignation.

Étape 1 : La phase de prise de conscience d’une différence

“je me sens différent-e”

C’est une sensation de ne pas être comme les autres, notamment par rapport aux rôles de genre, aux centres d’intérêt ou à la sensibilité (avant 13 ans, ce n’est pas forcément vécu comme en lien avec une orientation sexuelle), puis en raison d’une attirance pour une personne de même sexe.

Étape 2 : La phase de questionnement identitaire

“je suis peut-être homo ?” “je suis peut-être bi.e ?”

C’est le moment où son attirance pour des personnes du même genre se développe ou s’affirme. Cela peut arriver de plusieurs façons, par exemple : 
– tomber amoureuse ou amoureux, 
– ressentir de l’attraction physique ou de l’excitation,
– faire des rêves passionnés.

Parfois il est difficile de faire la différence entre une forte amitié et un sentiment amoureux, entre de l’admiration et du désir, entre les fantasmes et ce qu’on se sent réellement prêt-e à réaliser… C’est pourquoi cela peut prendre du temps de mettre au clair ce que l’on ressent ! Alors il est bon de le prendre, ce temps, de voir, de ressentir, éventuellement d’essayer… 
Lorsque les attirances se répètent, ou sont très intenses, ou qu’on peut vivre des expériences pour les confirmer, alors la certitude se forme. 

Pour d’autres personnes, les choses sont claires dès le début, et il n’y a pas de moment de doute. C’est souvent le cas chez celles et ceux qui ont une vision positive de l’homosexualité ou de la bisexualité et qui n’ont pas de raison de se poser beaucoup de questions.

En revanche, si on en a une vision défavorable, cette phase peut malheureusement s’accompagner d’émotions désagréables comme la culpabilité, la honte ou le refoulement. C’est lié au fait que dès l’enfance, on a entendu et intégré certaines idées négatives sur l’homosexualité, ou simplement parce qu’on n’est plus “comme tout le monde”. Pour quelqu’un-e qui se pensait hétéro depuis l’enfance, il faut changer “d’étiquette”. Cela crée souvent de l’anxiété et de la souffrance car ce n’est pas un choix. C’est d’autant plus difficile car il est compliqué d’en parler à qui que ce soit lorsqu’on est encore soi-même dans la confusion, et on se sent isolé.e. 

Suite à ce questionnement, il y a plusieurs réactions possibles, et qui peuvent se suivre ou alterner dans le temps :
– nier ou inhiber ses pensées, sentiments et comportements ;
– les minimiser ou les considérer comme temporaires, comme des essais, mais sans les intégrer à son identité ;
– envisager la possibilité d’être bi.e ou homosexuel-le, affirmer sa différence.

A ce moment, ou plus tard lors de l’étape suivante, peuvent avoir lieu les premières expériences sexuelles, que ce soit avec des personnes de même sexe ou de sexe différent.

Une petite part des personnes qui se questionnent vont finalement se décrire plus tard comme majoritairement hétérosexuelles (soit parce que c’est le ressenti qui leur restera de leurs expérimentations, soit parce qu’elles auront choisi de s’autodésigner comme telles).

Pour d’autres, elles vont comprendre qu’elles sont LGBT sans pour autant déterminer encore précisément si elles sont bisexuelles ou homosexuelles : cela peut prendre du temps ou varier selon les expériences vécues.

Étape 3 : La phase d’appropriation de l’identité et de dévoilement aux autres

“je suis homo” ” je suis bi-e”

Lors de cette phase, on découvre des personnalités lesbiennes, gays, bies, on explore la culture LGBT, on cherche des modèles auxquels d’identifier, on rencontre d’autres personnes comme soi, et avec certaines on vit des expériences amicales, amoureuses ou sensuelles. Il est important que parmi ces expériences, beaucoup soient positives car elles permettront alors l’acceptation et l’affirmation, voire même la fierté identitaire. 
C’est également à ce moment qu’on pourra ressentir le besoin d’en parler, d’abord de façon prudente et sélective, puis de plus en plus large. Le coming out est une étape intimidante, par laquelle il faudra passer plusieurs fois, dans différents contextes plus ou moins faciles (famille, ami-e-s, travail, etc). Le tout premier coming out, puis le coming out aux parents, sont des étapes très importantes.

Étape 4 : La synthèse de l’identité

“je suis moi et, entre autres, homo/bi.e”

A l’arrivée à l’âge adulte, l’identité s’est davantage construite et s’articule autour de nombreuses facettes : la personnalité, les passions, la vie professionnelle, le mode de vie, les goûts, l’appartenance ethnique ou religieuse… L’orientation sexuelle est alors une particularité parmi beaucoup d’autres.

L’orientation sexuelle est dans le meilleur des cas vécue dans la paix et l’authenticité.

Vivre une histoire d’amour

Un autre stade important est celui d’une relation amoureuse. Même s’il est plus difficile pour les jeunes homos ou bi-e-s de trouver des modèles de couples auxquels s’identifier, ils/elles ont des envies assez similaires à celles des jeunes hétéros. L’obstacle qui s’oppose à cela est généralement le faible nombre de partenaires potentiel-le-s, d’une part pour une question de rareté, d’autre part parce que tous et toutes n’affichent pas leur identité sexuelle au grand jour. Il faut donc se trouver ! Heureusement, l’apparition d’Internet a beaucoup facilité les choses pour les générations actuelles. Une étude portant sur de jeunes Américain-e-s gays et lesbiennes montrait qu’une grande majorité d’entre elles/eux considéraient les relations à long terme comme très importantes (2/3 des garçons et 80% des filles) et espéraient s’engager dans un couple dans les prochaines années, et plus encore après 30 ans (82% d’entre eux et 92% d’entre elles). Que ce soit dans les études américaines ou québécoises (malheureusement elles sont encore rares en France), la plupart envisagent de se marier et d’avoir des enfants, si la loi le leur permet.

Âges moyens où se passent ces étapes

Certaines études ont cherché à savoir si ces stades se produisaient plutôt à certains âges. Elles ont conclu que, là encore, c’était très variable d’une personne à l’autre. Il est possible de se sentir différent dès 3 ans, et d’éprouver ses premières attirances pour une personne du même sexe dès 8 ans. Pour autant, pour la plupart des personnes, cela arrive plutôt un peu avant et pendant la puberté. Le premier coming out se produit au plus tôt vers 11 ans, et le plus souvent entre 16 et 19 ans.
L’âge des premières relations sexuelles est varié également, probablement plus tôt entre garçons (autour de 15 ans) qu’entre filles (autour de 18 ans).  De nombreuses personnes en questionnement vont aussi avoir des relations sexuelles hétéro, qui peuvent servir à confirmer ou infirmer leurs ressentis. 

En tout, les chercheur.se.s ont établi qu’entre le premier et le troisième stade, il s’écoulait le plus souvent 2 à 10 ans. Il faut donc laisser du temps au temps, et se sentir libre de réfléchir et expérimenter autant que nécessaire avant de s’autodésigner et se dévoiler.